Modèles psychanalytiques de thérapie de couple et familiale

Place et pratique du TPCF en périnatalité (avant et après la naissance)

Elisabeth Darchis (Bois-Colombes, France) et Denis Mellier (Lyon, France)

Si des thérapies conjointes mère-bébé ou père-bébé existent depuis plusieurs décennies en Europe (Doumic, Bick, Debray, Lebovici, Cramer, Stern, Golse, Palacio, Daws…), les TPCF en périnatalité qui s’inspirent des travaux de Bion, Winicott et les psychanalystes de groupe et de famille exercent depuis moins longtemps. Ils affirment leur insertion et intensifient leurs théorisations depuis les années 90 en France et dans d’autres pays européens ou au Québec (Carel, Darchis, Maffre, Mellier, Arpin…). En thérapie psychanalytique périnatale, plusieurs générations sont présentes : le couple parental avec le bébé in utero ou le nouveau-né et les grands-parents ainsi que la fratrie. Ce n’est pas le père, la mère ou l’enfant qui sont privilégiés dans ce travail, mais la famille sujet dans son ensemble.

Cette  groupalité néonatale  contenue par le cadre thérapeutique favorise le voyage psychique nécessaire à la construction du nouveau groupe familial, avec l’indispensable  régression  et l’indispensable reprise avec le  matériel ancestral . Les retrouvailles avec d’anciennes expériences de groupe, la  résonance fantasmatique  avec les groupes internes, l’augmentation de la  modalité de communication non verbale , le partage des rêves en famille et de leurs associations, la clarification des collusions réciproques du couple et de la famille, vont  »  » à ressusciter  » les futurs parents et le groupe familial vers leurs racines et vers la fusion de l’origine, pour ensuite réinstaller le matériel ancestral et construire progressivement la mémoire collective du nouveau lien générationnel.

L’  appareil psychique familial  est ainsi mis à l’épreuve, comme en d’autres circonstances, par cette nouvelle répartition des dynamiques familiales, qui redistribue les investissements ; Les conflits, les problèmes d’identité et les fondements mêmes de l’organisation inconsciente de la vie familiale réapparaissent désormais. Cet ancrage dans le psychisme commun ouvrira la voie au nouveau groupe pour le soutenir et lui permettre de construire une  nouvelle enveloppe familiale, véritable berceau psychique pour accueillir l’enfant .

L’approche précoce du groupe familial naissant à travers des réseaux de soins psychiques en lien entre médecins somatiques et psychanalystes familiaux (PTF) s’avère efficace dans cette période de  crise familiale périnatale  fertile et sensible aux troubles. Dans cette étape organisatrice d’une génération, la capacité thérapeutique psychanalytique contribue à la déconstruction – reconstruction dans ce qui se joue dans la transmission psychique entre générations, en particulier dans la transformation des expériences catastrophiques de l’enfance, des souffrances familiales primitives, des traumatismes transgénérationnels, des hontes ancestrales ou des secrets de famille qui peut revenir dans ce qu’il faut appeler un  après-coup générationnel .

Le travail de symbolisation et d’élaboration psychique de groupe permet d’échapper aux répétitions et à la  confusion générationnelle  qui tendent à malmener les liens familiaux du fait d’un  télescopage des générations . Les TPCF en périnatalité réalisent une véritable prévention, dans le sens où ils accompagnent le groupe familial, l’éloignant des « traumatismes » familiaux et  confondant la parentalité  vers une différenciation des générations.

Grâce à l’introjection de la capacité thérapeutique, les parents reprennent le plaisir de rêver à la nouvelle famille qui pourra enfin construire son propre appareil psychique familial et son roman familial.

Bibliographie

  • CAREL A. (1988), « Transfert et périnatalité psychique. La fonction alpha à l’épreuve de la naissance »,  dans Gruppo , n° 4, Apsygée.
  • CAREL A. (1997), « L’après coup générationnel »,  dans  Eiguer A . et al., Le générationnel  Paris, Dunod. Traduction portugaise, São Paulo, Loyola, 1999. Traduction espagnole, Buenos Aires, Amorrortu, 2000.
  • CAREL A. (2004), « La périnatalité psychique et ses après-coups » dans  Périnatalité psychique et renaissance du familial,  Groupal,  Revue du Collège de psychanalyse groupale et familiale , N° 15, Paris.
  • CAREL A. (2007) Le travail de la nativité in Ciccone A., Mellier D.  Le bébé et le temps. Attention, rythme et intersubjectivité,  Paris, Dunod.
  • DARCHIS E. (1999) « Maison et parentalité : faire son nid » dans  La maison familiale, Divan familial N°3, Revue de la SFTFP,  Paris, Sous Presse.
  • DARCHIS E. (2002)  Ce bébé qui change votre vie , Deux volumes – T1 : Le temps d’avant la naissance – T2 : Les premiers mois en famille, Fleurus. Coll. Métier de parents.
  • DARCHIS E. (2004) « Prévention familiale en périnatalité » dans  Prévention précoce, parentalité et périnatalité  sous la direction de M. Dugnat, Toulouse, Erès.
  • DARCHIS E. (2005) « Pérégrination du fantôme en périnatalité : un aspect du transgénérationnel » dans  Le Divan familial n° 15 ,  Revue de la SFTFP , Paris, Sous Presse.
  • DARCHIS E. (2005) « Crises familiales en périnatalité » dans  Les crises familiales, violence et reconstruction , dirigé par Decherf G. et Darchis E., Sous Presse, Paris.
  • MAFFRE F. (2004) « Des bébés en péril » dans  Périnatalité psychique et renaissance du familial , RPPG, n° 15.
  • MELLIER D. (2005)  Les bébés en détresse : Intersubjectivité et travail de lien, une théorie de la fonction contenante,  PUF.
  • MELLIER D. et al. (2002)  Vie souffrance émotionnelle et du bébé ,  Dunod.
  • MISSONNIER S. et GOLSE B (2003)  La consultation thérapeutique périnatale : Un psychologue à la maternité ,  Toulouse, ERES.