REVUE N° 11 | ANNE 2012 / 1

LE MALÊTRE – RENÉ KAÉS

Auteur : BENHAIM David
Lenguaje : Française
SECTIONS : NOTES DE LECTURE


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NOTES DE LECTURE

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Le Malêtre

René Kaës

Collection: Psychismes,

Dunod, 2012 

EAN13 : 9782100581825

 

La question du malaise inquiète non seulement les psychanalystes mais aussi les sociologues et, de façon plus large, tous les intellectuels dont le rôle est de réfléchir aux problèmes de notre temps. Lorsqu’on se penche sur les publications de ces dernières années, on retrouve le terme malaise dans le titre   d’ouvrages et          d’articles    qui interrogent la société et la culture. C’est le signe que cette voie de réflexion ouverte par Freud a marqué et ne cesse de marquer la pensée et la culture occidentales, mais c’est aussi le signe de «l’actualité du malaise» pour reprendre le titre d’un article de Pontalis. La société du malaise d’Alain Ehrenberg, L’actuel malaise dans la culture de François Richard en sont deux exemples. Toutefois RK ne parle pas de malaise mais de malêtre. Ce changement dans la nomination – sur lequel je reviendrai- nous dit d’abord ce qui nous sépare de Freud. Si, comme psychanalystes,  nous avons à reprendre la question du malaise dans l’esprit de Freud, nous devons tenir compte également de notre insertion dans un monde qui s’est transformé. Ce qui nous amène à penser que le malaise d’aujourd’hui n’est pas qu’un simple prolongement de celui que Freud analyse. C’est pourquoi RK en appelle à «une réflexion renouvelée sur la souffrance psychique de notre temps dans les rapports qu’elle noue avec le malêtre dans le monde contemporain[1].» Il insiste sur la nécessité et la possibilité de «proposer un autre point de vue psychanalytique sur la consistance de ce malêtre6bis». Pourquoi nécessité? Pour trois raisons : a/notre environnement – comme je viens de le signaler – n’est plus celui où Freud a écrit son essai. Ce dernier se situe dans le contexte historique de l’entre-deux guerres; b/les formes de la pathologie et de la souffrance psychique s’inscrivent dans de nouvelles configurations; c/ la persistance du désordre mondial, des crises, du malaise et du malêtre de et dans la culture est devenu un fait permanent.

Pourquoi possibilité? Parce que nous avons de nouveaux dispositifs de travail psychanalytique et de nouveaux outils conceptuels pour mener à bien cette analyse. L’inconscient produit des formes de subjectivités nouvelles que nous sommes capables de reconnaître; il engendre des conflits par lui-même en raison des exigences que lui impose «son double ombilic biologique et intersubjectif» mais aussi par «son inscription conflictuelle dans l’espace social et culturel28

RK tient compte de l’extension, des développements et des changements qui se sont opérés dans le champ de la pratique et de la théorisation psychanalytiques. «La psychanalyse qui organisait la vision de Freud, affirme-t-il, a changé[2]»; elle n’est pas restée confinée à la cure individuelle : elle s’est ouverte aux groupes, aux couples, aux familles et aux institutions. Cette ouverture a été caractérisée par la constitution de nouveaux outils conceptuels qui permettent de penser des phénomènes psychiques qui, auparavant, n’étaient pas accessibles. En ce sens, il pose la question du malêtre non plus à partir d’une perspective centrée quasi exclusivement sur le sujet ou sur l’individu – comme dirait Freud -, mais à partir de son expérience des ensembles, d’une pratique des groupes qui tient compte à la fois du groupe comme totalité et de la position du sujet singulier à l’intérieur du groupe. Le dispositif à partir duquel s’instaure l’écoute de l’inconscient est un dispositif groupal. Il y a un décentrement par rapport à la cure individuelle. Comme je l’ai écrit dans un article sur la spécificité du complexe fraternel, la perspective à partir de laquelle RK aborde les questions psychanalytiques est une perspective groupale. «Le groupe constitue un paradigme méthodologique qui rend possible l’analyse des ensembles intersubjectifs et l’émergence des formations et des processus psychiques inconscients spécifiques, inaccessibles autrement. Cette perspective demeure strictement freudienne[3].» «Les dispositifs psychanalytiques de groupe sont aussi des moyens de traiter la souffrance des sujets dans leurs liens et dans les groupes dont ils font partie prenante, écrit RK. Comme toute psychothérapie, ils traitent les dérèglements pathologiques qui entravent la capacité d’aimer, de penser, de jouer et de travailler. C’est à partir de là que le travail psychanalytique en situation de groupe apporte des problématiques originales et des concepts spécifiques pour une intelligibilité nouvelle à la connaissance du malêtre contemporain[4]

Malaise et malêtre

Mais qu’est-ce que le malêtre et qu’est-ce qui le différencie du malaise? Le Trésor de la langue française définit malaise, d’abord, de façon générale, comme un état ou une sensation pénible. Il parle aussi d’un trouble qui affecte le psychisme, l’émotivité pour enfin le définir comme inquiétude, mécontentement sourd, insatisfaction (répandue dans un groupe social) se rapprochant ainsi du sens  freudien de malaise. Dans l’analyse qu’il consacre à Malaise dans la civilisation dans le Dictionnaire des œuvres politiques, Jean-Bertrand Pontalis qualifie, malaise, de  «curieux mot […], un mot discret, presque timide, très faible ou très fort selon la manière dont on veut l’entendre[5].» FR, de son côté, écrit : «L’affect de malaise est tout sauf simple : angoisse générée par une satisfaction pulsionnelle insuffisante, culpabilité afférente à une agressivité non éprouvée comme telle, ambivalence extrême immobilisée entre forces contraires égales, tentative de céder à la désubjectivation et sursaut du sujet[6].» En revanche, parler de malêtre, c’est parler de ce qui ébranle les fondements mêmes de la vie psychique. Le malêtre met en question la capacité même d’exister. «La question qui nous occupe, écrit RK, est celle des entraves majeures qui contrarient le processus de la subjectivation, le devenir Je, la capacité même d’exister, de nouer des liens et de faire société. Je forme le néologisme malêtre, sans trait d’union, comme on dit maltraitance ou malformation ou désêtre, parce qu’il s’agit de douleur, de détresse et de mal dans l’être même de l’humanité. Sans doute de grands mots, mais aussi de grands maux qui obligent à faire se côtoyer l’analyse clinique, la construction métapsychologique et l’interrogation ontologique[7].» Les bouleversements auxquels nous sommes confrontés, selon RK, ne sauraient être qualifiés ni de crises ni de malaise ; ces termes naguère adéquats pour parler de certains événements vécus dans l’histoire de l’humanité, sont aujourd’hui insuffisants pour qualifier ce que nous vivons. Nous sommes confrontés à «des mutations, c’est-à-dire à des changements structuraux et processuels dans les divers niveaux d’organisation de la vie : psychique, sociale, économique, culturelle[8]» affirme-t-il. Il ajoute : « […] désormais nous sommes en train de vivre un ébranlement qui atteint plus radicalement  notre possibilité d’être au monde avec les autres et notre capacité d’exister pour notre propre fin : cet ébranlement  interroge les dimensions écologiques et anthropologiques de ces mutations. L’être défaille avec ce qui le soutient. Ce malêtre dans l’humanité de l’homme, dans une large aire de l’humanité, produit à la fois cette imprégnation sombre et mélancolique qui s’empare des esprits et des corps, des liens intersubjectifs et des structures sociales, et cette culture de l’excès maniaque et omnipotent[9].» Il ne s’agira donc pas pour RK d’ajouter un nouveau commentaire à l’essai de Freud mais de le replacer « dans son contexte historique, celui qui parcourt le temps et les mentalités entre la première et la seconde modernité[10]».  

 

Dessein du livre

Nous connaissons aujourd’hui une «nouvelle conjonction critique des rapports entre inconscient et culture» ce qui fait que le dessein de son livre sera de « […] prendre appui sur les problématiques et les concepts issus de l’extension du champ  de la pratique et de la théorisation de la psychanalyse pour poursuivre le débat ouvert par Freud en l’engageant sur de nouvelles voies[11].» C’est pourquoi d’un point de vue méthodologique, le chapitre 5 Penser le malêtre avec la psychanalyse  est un chapitre charnière qui expose d’une façon sobre et précise l’approche spécifique et les outils conceptuels qui permettent d’analyser le malêtre. Les chapitres qui suivent et qui abordent diverses manifestations de ce malêtre ne peuvent être compris qu’à partir de là. Il est important de  souligner que ce livre est un essai psychanalytique particulier qui s’appuie sur un savoir qui, comme Kaës le souligne en citant une phrase de Braudel, est constitué par «toutes les disciplines des sciences de l’homme [qui] sont tour à tour les auxiliaires de chacune d’entre elles39.» Il s’ensuit, que «la psychanalyse [est] dans son activité théorisante et dans sa méthode […] une science de l’Homme, et je pense que la psychanalyse doit prêter attention à ce que disent les autres disciplines pour dégager les traits pertinents pour sa propre élaboration et rencontrer les limites de sa propre approche[12].» Qu’est-ce qu’un essai? «Un travail de réflexion personnelle sur un sujet que l’auteur ne prétend pas épuiser, écrit RK. Il expose son sujet et il en développe librement les thèmes et les variations sur divers modes : assertif, critique, hypothétique, sans se tenir obligé d’apporter comme dans une étude universitaire, les éléments de preuve ou de démonstration.

Toutefois, j’ai souhaité étayer mes propositions sur des données ou des études référencées. Enfin, la part de la spéculation est ici inévitable : elle est sans doute souhaitable dans un essai, si l’on accepte l’idée que la spéculation est une des voies de la recherche, comme elle l’a été chez Freud[13].» Pour le construire, RK a repris le paradigme de la complexité «qui implique, dans l’investigation, la prise en compte des rapports de partie à tout, des niveaux hiérarchiques d’organisation, des rétroactions, des changements brusques de formes (E. Morin)[14].» Comme j’aurai l’occasion de le montrer, il introduira les concepts de niveaux méta, de garants, de répondant, d’alliances inconscientes. Il avoue sa difficulté à écrire ce livre : « J’ai mis près d’un quart de siècle à écrire ce livre.» D’où vient la difficulté ? Au fil des années, il a saisi la complexité croissante de sa tâche, complexité qui se révèle dans l’impossibilité de «maîtriser les dimensions et les contenus» mais aussi de chercher et se tenir sur la ligne de crête entre deux versants : le champ culturel, social et historique et l’espace propre des objets de la psychanalyse. Les concepts sont parfois très proches dans ces deux champs, mais ne se correspondent pas ou n’ont pas les mêmes significations. Kaës s’est limité, comme il l’affirme lui-même, à «collecter mes informations auprès de ceux qui m’aideraient  à repérer dans le décours de plusieurs siècles les mouvements d’arrière-fond qui ont travaillé sur le long terme les composantes du malêtre actuel, dans les ruptures et les continuités de l’histoire[15].» Ce qui veut dire que «ce qui, aujourd’hui qualifie le malêtre dans le monde contemporain s’est constitué et s’est développé dans le cours de l’histoire avec les techniques, les mentalités, les mouvements sociaux propres à chaque période, et à travers le travail de la culture qui demeure une constante de chacune d’entre elles[16]

Le travail de la culture, dont nous devons la thématisation à NZ, est «un processus universel de formation de l’humanité et de la subjectivation du sujet[17].» Il est, selon RK, impératif, interminable et précaire. Les historiens, mais aussi les sociologues et les anthropologues, le décrivent en mettant en lumière son développement par périodes, par phases, par aires et par domaines. De son côté «le psychanalyste, affirme RK, doit lui aussi prêter attention à ce que l’esprit du temps[18] modèle et inscrit dans la psyché de ses patients et dans sa propre capacité d’accomplir sa fonction psychanalytique[19].» En identifiant les «mouvements d’arrièrefond» qui sont à la source du malêtre, RK se place d’emblée au cœur de son essai en «articul[ant] les repérages structuraux du malêtre avec leurs déterminants historiques, sociaux et culturels; [en] pren[ant] en considération les butées et les ratés du travail de culture pour en examiner les effets sur le malêtre de la vie psychique de notre temps; [en] relev[ant] les ressources que les achoppements de ce travail  libèrent  et renouvellent. Il s’agira enfin de mobiliser les ressources des disciplines connexes qui apportent leur éclairage spécifique à ces analyses[20]

 

La modernité

La modernité apparaît comme la première rupture que nous pouvons identifier. Ce terme a deux acceptions : d’abord un sens commun qui «désigne les transformations, la nouveauté des objets et des mentalités d’un monde en train de changer[21]». En ce sens on parlera d’une opposition aux «anciens» qui, eux, resteraient attachés à la tradition. Un second sens, celui des historiens, pour qui la modernité est cette période de l’histoire dont la durée est variable, mais qui peut être située à la fin du Moyen Âge et dont les premières manifestations apparaissent au XVIe siècle avec la Renaissance. Il s’agit d’une rupture avec la «culture» du Moyen Âge. Le XVIIe et le XVIIIe siècle avec Descartes et le mouvement de l’Aufklärung, la philosophie des Lumières, assoieront les fondements philosophiques et politiques de la modernité. Les grandes découvertes, découverte de l’Amérique, invention de l’imprimerie, révolution physicienne qui commence avec Copernic qui lui donnera son nom – révolution copernicienne – et sera menée à terme par Galilée, constituent les moments forts de cette rupture. Si Copernic demeure prudent en restant au niveau des hypothèses, Galilée, de son côté, proposera une véritable révolution intellectuelle et cosmologique qui mettra fin à la conception médiévale du monde. RK, à la suite de certains historiens, distingue deux modernités : une première qui irait jusqu’à la fin de la première guerre mondiale et un second moment qui irait jusqu’à la fin de la seconde. C’est dans cet entre-deux que Freud écrira Malaise dans la culture. Deux processus conjoints, l’industrialisation et l’urbanisation vont donner forme au socle matériel de la première modernité. L’idéologie qui prendra forme et se cristallisera avec la philosophie des Lumières sera celle du Progrès. «Toute la seconde modernité est travaillée par deux guerres européennes incluses dans les guerres mondiales, par deux génocides massifs et par une nouvelle révolution qui, dans les contradictions de la première révolution industrielle, fomente avec les guerres les grands massifs idéologiques qui domineront la seconde modernité jusqu’à la fin des années 1980 : le communisme, le nazisme, les nationalismes fascistes[22]

Quelles conclusions pouvons-nous dégager de cette rapide esquisse des modernités? Les modernités sont des cultures critiques qui, en s’attaquant aux croyances et aux certitudes établies, nous dévoilent les garants métasociaux et métaphysiques sur lesquels est fondée la société traditionnelle. En effet, mythes, religions et idéaux collectifs constituent des systèmes de sens et de valeurs qui garantissent l’ordre social et le sens; ils «forment la relative unité d’une civilisation[23]».

«La première modernité a mis en évidence qu’un ordre social et un ordre du sens ne se soutiennent pas par eux-mêmes, mais qu’ils sont contenus, maintenus et garantis par un ordre supérieur, transcendant, religieux[24].» Le mot de Nietzsche, «Dieu est mort», résume la critique radicale de tous ces garants; cependant, de nouveaux garants viendront remplacer les anciens et seront critiqués à leur tour. «Ce paradoxe de la modernité, écrit RK, est porteur d’une crise profonde, permanente. Cette crise révèle que les interprétations collectives du réel ne sont plus en mesure de produire du sens et de soutenir les liens sociaux[25]

 

La postmodernité

La postmodernité apparaît ensuite comme mise en question et prolongement des modernités. Quand commence-t-elle? Elle irait de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’aux années 1980. Elle connaît son acmé en 1968 et sa chute en 1989, date de la chute du mur de Berlin. Elle a son origine dans un courant de l’architecture «qui célèbre le mélange des styles, des genres et des disciplines[26].» Refus des références privilégiées, refus de l’héritage, refus de tout ancrage, récusation de l’universel et du progrès, refus de toute hiérarchie, désintégration des «grands récits» comme le proclamera J.-F. Lyotard :

«tout s’équivaut : rien ne garantit rien[27].» Nous sommes dans le relativisme généralisé des discours et des valeurs. « La postmodernité, écrit RK, est le nouveau symptôme d’une crise historique de structure. Elle l’exprime, elle en fait une valeur[28].» Mais sa valeur de rupture ne peut véritablement s’évaluer que dans l’après-coup. Un affect de deuil traverse la modernité en nous confrontant à «tant de morts majuscules» selon la jolie expression de Kaës : celle de Dieu et celle des civilisations annoncée par Paul Valéry. La postmodernité accentuera ce deuil avec l’annonce de la mort de l’Homme et de l’humanisme. «Ce sont là, il est vrai, des morts théoriques, écrit Kaës, mais elles rendent compte aussi des morts bien réelles, à la mesure de nos technologies et de nos haines[29].» La psychanalyse, dans la postmodernité, est confrontée à d’autres modèles du fonctionnement psychique «sous l’effet de la rencontre clinique avec d’autres formes de pathologie et de la mise en œuvre de dispositifs innovants pour les traiter[30]

 

L’hypermodernité

Elle commence à la fin des années 1980 qui connaît la chute du Mur de Berlin avec ses conséquences géopolitiques et se continue avec l’attaque des tours du World Trade Center de New York du 11 septembre 2001 avec les conséquences planétaires qui s’ensuivirent. Culture de l’effondrement? En tous cas le préfixe hyper semble être sa caractéristique essentielle : c’est une culture de l’excès. «Les mots-clés de l’hypermodernité,  écrit RK, sont : hyperstimulation, hypercommunication, hyperdéveloppement, hyperconsommation, prolifération. Ses corrélats : dérèglements et dérégulations généralisés, pulvérisations des limites. D’une certaine manière l’hypermodernité serait l’exacerbation de certains traits déjà présents dans la postmodernité et dans la modernité, elle serait leur radicalisation, leur moment critique culminant.»[31] L’hypermodernité se construit sur des  bases «hétérogènes, ambiguës, à la fois contradictoires et convergentes[32].» Affirmer un de ses caractères oblige à évoquer son antagoniste et tous deux sont hyperboliques. Des «mouvements contraires et excessifs traversent les sociétés hypermodernes[33].» Ainsi le renouveau des recherches spirituelles et religieuses s’affirme dans l’excès tout comme les positions agnostiques ou athées. Ces affirmations prennent de nouvelles formes de guerre de religions. Fondamentalismes et hédonismes militants s’affrontent de manière radicale. Cependant, à travers ces contradictions et ces antagonismes, nous pouvons apercevoir des courants plus profonds qui travaillent cette hypermodernité.

  • La grande inquiétude «qui saisit une partie de l’humanité devant l’ampleur et la rapidité  des changements survenus au cours de ces dernières décennies[34]
  • L’essor de l’économie hyperlibérale et les crises du capitalisme financier.
  • La société des individus et la crise de la communauté.

Deux auteurs sont ici convoqués, le sociologue Norbert Elias, auteur de La société des individus et le politologue italien R. Esposito. Le premier s’attache à montrer que parallèlement à l’ère des masses et à la toutepuissance des groupes d’appartenance émerge l’idée moderne d’individu qui est le résultat «d’un processus qui […] avait occulté la différenciation progressive de l’individu et la société[35].» Ce dernier est animé d’un idéal d’autonomie du Moi qui est contredit par sa «dépendance à l’égard des ensembles planétaires dont les États appliquent les principes dans leur organisation[36]», ce qui suscite chez lui un sentiment d’impuissance qui se traduit par «l’omnipotence narcissique et l’affirmation de valeurs égotistes[37].» Le second, Esposito, déconstruit le concept contemporain de la communauté et soutient l’idée qu’elle «n’est pas essentiellement un groupe que rassemble un intérêt commun et la permanence d’une identité, la communauté suppose au contraire une instabilité originaire : ce que nous, tous les êtres humains, avons en commun (cum), n’est rien d’autre qu’un don à faire (munus), soit une exposition permanente  à autrui[38].» Comment stabiliser ce processus sans fond et sans garantie de la vie? En mettant en place «des systèmes d’immunisation dont l’efficacité tend à se retourner contre les populations[39]» : voilà ce qu’ont fait les régimes politiques modernes de Hobbes au néo-libéralisme actuel en passant par le nazisme. «Cette pensée du négatif de la communauté, écrit RK, nous met en garde  contre les contradictions de la société des individus et conjointement contre la société de l’hypercontrôle (fiches et bases de données), contre la sécurité obsédante, contre ce qu’Esposito nomme l’immunité, c’est-à-dire la protection et la négation de la vie[40]

  • Des processus sans sujet et l’absence de répondant

On  peut rappeler ici la distinction de F. Tönnies à propos des sociétés humaines décrites au XIXe siècle : la communauté fondée sur les liens d’attachement des individus entre eux, conçu sur le modèle de l’organisme vivant, la Gemeinschaft et la société fondée sur des rapports de concurrence entre les individus, qui implique un ordre extérieur légal et juridique, la Gessellschaft. Elles représentent deux modalités d’association qui se désagrègent «dans la mesure où les rapports sociaux de production sont soumis aux «lois du marché», où la dématérialisation de la finance porte l’économie réelle à un tel effet d’abstraction et de virtualisation – on pourrait dire d’hyperréalité – que nous avons affaire à une nouvelle forme de «processus sans sujet»[41].» Ce sont des processus qui se développent hors contrôle du sujet, «dans des organisations sur lesquelles le désir et la volonté  humaines n’ont plus de prise, qui ne les sollicitent plus.[42]» L’hypermodernité les amplifie et les radicalise. Les processus sans sujet qui nous intéressent ici sont ce qui concernent particulièrement le sujet de l’inconscient «et la réduction  de sa potentialité à devenir «Je» à l’état d’un individu – élément interchangeable sans épaisseur. Ce qui est en question est sa négation en tant qu’être de désir, c’est-à-dire conflictuel, historique, subjectif[43].» Nous sommes en présence de processus de désubjectivation qui sont associés à trois facteurs majeurs de la grande inquiétude qui affecte le sujet dans l’hypermodernité : d’abord, ce que Castoriadis appelle «la montée de l’insignifiance»; ensuite, ce que RK appelle le silence des répondants; enfin les automates institutionnelles. «Ces processus attaquent à la fois le sociétal, les liens intersubjectifs et la subjectivation; ils contiennent et entretiennent une charge persécutoire qui entre dans la composition du malêtre contemporain[44]

  • Crise de la politique, critique de la démocratie

Claude Lefort, Cornélius Castoriadis et Myriam Revault d’Allonnes sont ici convoqués pour penser cette crise de la politique et cette critique de la démocratie. La conjonction des traits évoqués plus haut nous oblige à reprendre le projet de Lefort et Castoriadis – qui consistait dans «l’analyse critique et engagée du phénomène totalitaire conçu comme phénomène politique, tel que l’a incarné la bureaucratie stalinienne et poststalinienne» – sous la forme d’un renouvellement de la pensée des rapports entre totalitarisme et individualisme. La critique de la démocratie et la haine qu’elle suscite aujourd’hui sont déterminées par ces traits. L’objectif de tout totalitarisme est la destruction de la démocratie «en ce qu’elle se fonde  comme le lieu du «pouvoir-vide» mettant un terme au «pouvoir-Un» incarné dans la figure transcendante du Roi ou du Parti. La critique du totalitarisme est celle de tout garant métasocial transcendantal qui se fonderait sur des dogmes[45].» De son côté Revault d’Allonnes reprend l’idée de Lefort qui veut que la démocratie tienne «sa spécificité d’assumer et de réguler les conflits et les antagonismes inhérents à la société[46].» Si elle suscite inquiétude, malaise et déception, c’est parce qu’elle accueille le conflit, l’incertitude et les prend en compte, mais elle est menacée «par le retour du Pouvoir-Un et du fantasme qui le soutient, par toutes les entreprises qui créent de nouvelles emprises idéologiques, sous la triple égide de l’Idée omnipotente, de l’Idéal cruel et de l’Idole impitoyable. D’où les mesures pour refaire de la certitude, pour créer et imposer de nouvelles idéologies[47].» C’est l’œuvre des fondamentalismes, du néo-libéralisme intégral, qui veulent construire un ordre anti-démocratique en conjurant l’indétermination et en assurant «la réduction du sujet pluriel, divisé, problématique, ingouvernable», celui de la démocratie[48]» alors que cette dernière exige et soutient […] une invention continue de la liberté de penser et de décider[49]

  • Ambiguïté de la transparence

Le Trésor de la langue française définit la transparence comme «qualité d’une institution qui informe complètement  sur son fonctionnement et ses pratiques[50].» Les sociétés libérales retiennent ce principe dans la mesure où elles «prônent la nécessité de rendre visible ce qui est caché dans les comportements des individus, des groupes et des institutions, au nom des droits des individus à être informés, puis du contrôle, puis de l’éthique[51].» La transparence se justifie au nom d’une autre valeur de l’hypermodernité : «tout ce qui est techniquement disponible doit être mis en œuvre et accessible[52].» L’objectif de la transparence n’est pas que d’informer; il est surtout de surveiller «tout ce qui pourrait entraver l’efficacité du fonctionnement des institutions et des entreprises.[53]» Le paradoxe qui en résulte réside dans «la collaboration des personnes qui exposent leur vie privée sur les réseaux sociaux notamment, illustrant ainsi cet aspect de la servitude volontaire.[54]» Pour RK, cette culture hypermoderne de la transparence apparaît comme un avatar de la société du spectacle de Guy Debord. «Tout voir, tout montrer ce qui est de l’ordre du privé est à la fois la contre-face de l’opaque et de l’occulte qui travaillent de tout temps les processus et les organisations du pouvoir politique et économique, et la contradiction non résolue entre l’exigence sociale de transparence absolue et les valeurs absolutisées de la vie privée[55].» Devant une telle exigence de transparence comment préserver des espaces de secret, le droit au secret dont parlait Aulagnier, condition même pour que le Je puisse advenir et penser ? Ce droit au secret est «une conquête du Je», «le Je doit pouvoir opposer, comme en son temps au pouvoir maternel, l’inaliénabilité de son droit de jouissance sur certaines de ses pensées, son droit à penser secrètement et à en éprouver du plaisir[56]

Critique de l’approche déficitaire des modernités.

On ne peut pas faire l’économie d’une approche critique des modernités et des rapports qu’elles entretiennent avec le malêtre psychique et social qu’elles génèrent. Elle ne vise pas à ne souligner que les aspects négatifs des modernités. RK fait remarquer avec justesse qu’une approche déficitaire «entraine la tentation de l’orthopédie, de la compensation, du comblement.» Ce type d’approche «fait partie des symptômes du malêtre[57].» L’approche critique doit donc être purgée «de ses tentations pessimistes, comme la nouveauté ne doit pas être a priori optimiste.[58]» La limite d’une approche déficitaire est de ne pas solliciter «l’intérêt pour ce qui n’est pas encore advenu, la capacité de penser le nouveau. Nous devons donc aussi être attentifs à l’émergence de nouvelles expériences, de nouvelles propositions, de nouvelles valeurs[59].» Si nous excluons cette attitude, nous ne pourrons pas soutenir «la formation de nouveaux conteneurs de pensée et d’action, de mettre en œuvre des fonctions alpha, et au-delà, de repérer les prémices de nouveaux modèles, de nouveaux mythes organisateurs, et de nouvelles manières de vivre ensemble. Les désorganisations travaillent aussi, silencieusement et à notre insu, à ouvrir de nouvelles voies de création[60]

 

Le Malêtre

«Quel est l’impact des mutations sociohistoriques sur le malêtre psychique de notre temps et sur les formes de subjectivité qu’il suscite? Comment le travail de la culture interprète-t-il ces changements et comment conçoit-il les issues de ce malêtre?[61]» se demande Kaës à la suite de cette rapide esquisse des modernités et de leurs caractéristiques.

Sa réponse est nette : «Les dernières périodes de la modernité posent à la psychanalyse des questions qui, quant au fond, portent sur les mêmes problèmes que ceux qui occupaient la pensée de Freud lorsqu’il faisait le diagnostic  du malaise dans la culture en opposant les exigences de la pulsion à celles de la culture et du vivre ensemble. Aujourd’hui encore, il s’agit de faire la part de ce qui, à côté des sources de la souffrance inhérente à la psyché humaine et des ressources dont elle dispose, revient aux déterminants culturels du malêtre propre à une époque[62].» Mais plusieurs choses ont changé : d’abord les dimensions de ces problèmes et notre manière de les penser; ensuite, à travers la clinique nous avons acquis de nouveau modèles d’intelligibilité, de nouveaux dispositifs nous ont rendu accessible ce qui auparavant ne l’était pas, modifiant ainsi notre conception de la vie psychique; enfin, les visions du monde, la culture, la société, l’économie ont changé. En paraphrasant Foucault, nous pourrions dire que nous sommes dans une autre épistémè et en conséquence «dans une autre manière de concevoir le sujet de l’inconscient, les lieux où il se construit et les formes de subjectivité qui le spécifient[63]» écrit Kaës.

Pour saisir l’impact des mutations socio-historiques sur le malêtre psychique de notre temps, je vais envisager ce que l’approche groupale de la psyché apporte à son intelligibilité en me limitant au niveau méta de l’analyse et en suivant l’intention de Kaës qui n’est pas d’opposer le psychique au social, ni de les traiter séparément mais de les articuler.  «Chaque espace et chaque ordre de réalité psychique se définit par ses propriétés spécifiques, écrit Kaës, mais aussi par les rapports  qu’ils entretiennent les uns avec les autres. Introduire un niveau méta dans l’analyse des rapports entre les espaces indique que chaque espace est soutenu et travaillé par celui ou ceux qui l’encadrent, le contiennent et l’étayent à un niveau logique supérieur[64]

En composition avec certains concepts, le préfixe méta indique un changement de lieu ou de place (métaphore), de condition (métabolisme), du niveau d’organisation d’un processus (métalangage, métacommunication) ou de la réflexion (métaphysique,

métapsychologie). «Le niveau méta, écrit Kaës, introduit conjointement  une continuité et une distance  entre deux niveaux logiques : par exemple, l’espace psychique du groupe est en position méta par rapport à l’espace psychique individuel. Les espaces et les dispositifs du niveau 2 encadrent les espaces  et les dispositifs du niveau I et agissent sur eux. Ce sont des espaces et des dispositifs d’arrière-fond[65].» Les formations méta remplissent plusieurs fonctions pour les formations qu’elles encadrent : fonctions d’étayage, de soutien, de garant, de cadre structurant. Kaës distingue entre deux principales formations méta : les formations métapsychiques et les formations métasociales.

Que sont les formations métasociales? Leur fonction est d’encadrer, de contenir et de réguler les formations sociales et culturelles. Elles sont implicites et ne se révèlent qu’à «l’occasion des transformations ou des mutations qui bouleversent les grandes structures sociales et les processus d’encadrement de la vie sociale[66].» Ces formations accomplissent une fonction de garant «en ce qu’elles fondent et garantissent  la légitimité des organisations sociales sur des principes et des ordres qui les transcendent[67].» Les mythes et les idéologies, les croyances et les religions, les figures de l’Autorité et de la Hiérarchie, les institutions culturelles et politiques, la Constitution, constituent des garants métasociaux, notion que RK emprunte au sociologue Alain Touraine. Sous l’Ancien Régime, les garants métasociaux sont unifiés dans la personne du Roi; la Révolution française va les diviser en plusieurs éléments. Nous serons d’accord avec RK pour affirmer que, si une partie de la réalité psychique inconsciente échappe à toute détermination sociale ou intersubjective, la vie psychique ne peut se développer que sur la base de l’exigence de travail psychique qu’impose à la psyché son inscription dans les liens intersubjectifs  primaires  et dans les liens sociaux[68]

Les formations métapsychiques, quant à elles, sont également implicites et s’apparentent au cadre muet décrit par José Bleger. Elles vont de soi tant qu’elles ne manifestent ni défaillance ni désorganisation. Elles vont émerger dans les moments de crise ou de rupture, lorsque la vie psychique perd sa continuité. Pour faire image, je comparerai ces formations autant métasociales que métapsychiques à ce qui se passe lors d’un séisme lorsque le sol se dérobe sous nos pieds, nous prenons alors conscience de la fonction essentielle que le sol joue dans notre vie quotidienne, fonction qui reste muette pour nous tant que le sol peut nous porter. Tout comme au niveau social, nous pouvons parler de garants métapsychiques en entendant par là «les formations et les processus de l’environnement sur lesquels s’étaie et se structure la psyché de chaque sujet. Ils consistent essentiellement dans les interdits fondamentaux et les contrats intersubjectifs qui contiennent les principes organisateurs de la structuration du psychisme. Ils forment ainsi le cadre et l’arrière-fond implicites de [la psyché][69].» Ces formations accomplissent des fonctions d’étayage, de cadre et de garant pour la formation et le fonctionnement de la psyché, mais aussi elles jouent un rôle essentiel dans la structuration de la psyché  et dans les processus de subjectivation. Les alliances inconscientes, les repères identificatoires, les énoncés de certitude «qui assurent une représentation fiable du monde interne et du monde environnement» sont des formations méta. L’hypothèse de RK est que «les défaillances, les désorganisations et les recompositions des formations métasociales de la vie sociale affectent corrélativement les formations métapsychiques de la vie psychique et par conséquent  la vie psychique elle-même, et plus particulièrement ses garants métapsychiques[70]

Les mutations multidimensionnelles qui, depuis l’aube de la modernité jusqu’à l’hypermodernité, ont bouleversé la culture et les sociétés occidentales sont une des sources du malêtre contemporain dans la mesure où elles ont ébranlé les formations métasociales de la vie sociale et culturelle qui ont connu des défaillances et des désorganisations qui ne leur permettent plus d’assurer leurs fonctions de garants. «Leur lente décomposition, écrit RK, à peine perceptible, ou leur rupture cataclysmique sont génératrices d’incertitude, de régressions réactionnelles vers des garants radicaux – religieux, idéologiques – qui se mettent en place, signalant l’ampleur de l’angoisse devant ces crises[71]

Conclusion

Quelles sont les limites de cette approche psychanalytique pour l’analyse du malêtre?

Les pratiques de groupe et les données qu’elles apportent rencontrent de limites : si elles nous éclairent sur la multiplicité des facteurs qui entrent dans la constitution du malêtre, en revanche elles ne nous permettent que d’en cerner certaines dimensions. «C’est le propre  de toute définition d’un champ et de sa méthode d’accès[72].» Il est certain que «la compétence de la psychanalyse s’est élargie dans son objet et dans sa méthodologie[73]», cependant RK, de façon très lucide, se pose et nous pose plusieurs questions décisives qui ne sauraient être éludées et qui sollicitent notre réflexion : «jusqu’à quel point les données cliniques de l’analyse individuelle et du travail psychanalytique en dispositif de groupe, avec les institutions de soin, dans des dispositifs interculturels, ouvrent-elles un accès au champ social? Jusqu’à quel point peut-on considérer la psychopathologie des individus, des groupes, des familles et des institutions comme les signes, les symptômes ou les effets du malêtre social? Plus généralement, l’approche psychanalytique peut-elle sans risque de verser dans le réductionnisme, appliquer sa méthode et ses concepts à des problèmes aussi complexes, qui embrassent des civilisations hétérogènes dans leur histoire, dans leur organisation, dans leur mutation et dans le processus de leur développement74bis?» Kaës reprend ensuite une question qui parcourt toute sa réflexion sur le malêtre : «comment prendre en considération la différence et les articulations entre le sujet social et le sujet de l’inconscient? Ou bien, pour le dire d’une manière plus large, à quelles conditions est-il possible d’assurer à la psychanalyse sa compétence à traiter du malêtre du monde contemporain? Autant d’interrogations épistémologiques et méthodologiques que soulève l’extension des pratiques et des théorisations de la psychanalyse74bis.» Ces questions nous ouvrent un chantier de travail passionnant mais ardu.


[1] Kaës, R. (2012) Le Malêtre, Paris, Dunod, p. 1 28 Ibid., p. 1-2

[2] Ibid., p. 2

[3] Benhaïm, D. (2008) Y a-t-il une spécificité du complexe fraternel? In Revue canadienne de psychanalyse, vol. 16, n0 2, automne 2008, p. 246

[4] Le Malêtre, p. 113

[5] Châtelet, F., Duhamel, O., Pisier, É. (sous la direction de) Dictionnaire des œuvres politiques, Paris, PUF, Quadrige, p. 354

[6] L’actuel malaise dans la civilisation, p. 8-9

[7] Le malêtre, p. 4

[8] Ibid., p. 4

[9] Ibid., p. 4

[10] Ibid., p. 36

[11] Ibid., p. 2 39 Ibid., p. 36

[12] Ibid., p. 36

[13] Ibid., p. 10

[14] Encyclopaedia Universalis, Dictionnaire de la philosophie, Wunenburger, J.-J.,  Article, Complexité des sciences et philosophie de la nature, p.45777

[15] Ibid., p. 36

[16] Ibid., p. 35

[17] Le Malêtre, p. 35

[18] Cette expression est à prendre au sens fort que lui donnent les philosophes allemands Herder et Hegel qui parlent du Zeitgeist, c’est-à-dire d’une conception du monde caractéristique d’une période de l’histoire dans une aire culturelle particulière, qu’elle travaille et façonne. Ainsi un individu est pénétré par l’esprit de son temps et ne peut pas sauter par dessus son époque. Voir, Le Malêtre, p. 46, note 2.

[19] ., p. 35

[20] ., p. 36

[21] ., p. 36

[22] ., p. 42

[23] ., p. 45

[24] ., p. 45

[25] ., p. 45

[26] ., p. 75

[27] ., p. 75

[28] ., p. 76

[29] ., p. 80

[30] ., p. 81

[31] ., p. 82

[32] ., p. 82

[33] ., p. 83

[34] ., p. 83

[35] Ibid., p. 85

[36] Ibid., p. 86

[37] ., p. 86

[38] ., p. 87

[39] ., p. 87

[40] ., p. 87

[41] ., p. 87

[42] ., p. 88

[43] ., p. 88

[44] ., p. 88

[45] ., p. 89

[46] ., p. 89

[47] ., p. 89

[48] ., p. 89

[49] Ibid., p. 89

[50] Ibid., p. 89

[51] Ibid., p. 89

[52] ., p. 90

[53] ., p. 90

[54] ., p. 90

[55] ., p. 90

[56] Aulagnier, P. (1986 [1991]) Un interprète en quête de sens, Paris, Payot, Petite Bibliothèque Payot, p. 231

[57] Le Malêtre, p. 91

[58] ., p. 91

[59] ., p. 91

[60] ., p. 91

[61] ., p. 97

[62] ., p. 97

[63] Ibid., p. 98

[64] ., p. 109

[65] ., p. 109

[66] Ibid., p. 110

[67] Ibid., p. 110

[68] Kaës René, La structuration de la psyché dans le malaise du monde moderne », in Jean Furtos et Christian Laval, La santé mentale en actes, Érès, Études, recherches, actions en santé mentale en Europe, 2005, p. 239-253

[69] Ibid., p. 249

[70] Le Malêtre, p. 111

[71] Ibid., p. 111

[72] Ibid., p. 114

[73] Ibid., p. 114

Revue Internationale de Psychanalyse du Couple et de la Famille

AIPPF

ISSN 2105-1038