REVUE N° 20 | ANNE 2019 / 1
Introduction au numéro
« Histoire et histoires en psychanalyse de couples et familles«
Daniela Lucarelli[1], Massimiliano Sommantico[2]
Ce numéro 1-2019 de la Revue est dédié aux contributions du Congrès 2018 de l’AIPCF qui a s’est tenu à Lyon le 26-28 juillet.
Comme l’indiquait l’argument du Congrès, il sera ici question se centrer sur la confrontation des couples et des familles à l’Histoire (sociale, culturelle et politique) et des histoires singulières. Il s’agira, à travers les articles des auteurs qui ont contribué à ce numéro, de réfléchir sur les approches contemporaines des psychothérapies psychanalytiques de couple et de famille, certes différentes selon les cultures, les formations et les références des auteurs, mais toutes caractérisés par l’attention aux mouvements transférentiels, contre-transférentiels, voire inter-transférentiels, mobilisés dans le processus analytique.
On aura affaire, selon les cas, à une accentuation sur la subjectivation des histoires, favorisant la sortie des processus de répétition, ou bien sur l’ici et maintenant de la séance. Mais également aux traumatismes issus des histoires familiales, aussi bien que de l’Histoire, et à leurs répercussions sur les romans familiaux. Finalement, il s’agira de comprendre comment tout ça se montrera à l’œuvre dans les processus de transmission inter- et transgénérationnelle.
En ce sens, plusieurs focalisations seront présentées; entre autres, le positionnement interne de l’analyste, ou des analystes, les temporalités psychiques, les aménagements du cadre, les techniques de médiation, la créativité.
Janine Puget, avec son article Que faire de l’histoire et des histoires dans la vie quotidienne?, s’interroge sur la place, le rôle et l’effet que l’histoire de chacun et les histoires ont dans et sur la vie des familles et des couples. Elle aussi questionne, en particulier, la temporalité dont relèvent ces histoires.
Avec l’article Le lien de couple et l’usage idéologique et partagé d’aspects culturels, Daniela Lucarelli et Gabriela Tavazza se proposent, à travers l’analyse d’un matériel clinique relatif au traitement d’un couple, de montrer comment les conditions culturelles et intersubjectives de la vie psychique s’entremêlent aux conditions intrapsychiques et comment la défaillance des fonctions symbolisatrices extrasubjectives peut favoriser des configurations psychopathologiques déterminées.
Rosa Jaitin, avec son article Amistad, filiación y migración. El trabajo del psicoanalista familiar, propose une réflexion sur le travail des analystes de différentes cultures, qui œuvrent ensemble dans le cadre d’une institution de formation et en libéral, en se centrant sur la question de la cothérapie. À partir de cas cliniques de psychothérapie familiale psychanalytique, l’auteur analyse les différents niveaux de l’amitié dans les champs transférentiels, constitués par les transferts, les contre-transferts, aussi bien que par les inter-transferts.
Perrine Moran, dans son article Object relations and mentalization in couple psychotherapy, en s’appuyant sur l’analyse d’un cas clinique de psychothérapie psychanalytique de couple, montre combien la combinaison de mentalisation et de théorie de la relation d’objet peut aider l’analyste dans le travail avec les couples hautement conflictuels. L’auteur propose sa réflexion sur le processus analytique à partir des mouvements transférentiels et contre-transférentiels.
L’article d’Irma Morosini, El secreto en la narrativa de la historia familiar. La “segunda escena”, s’intéresse aux processus qui interviennent dans la narration familiale par rapport à la question du pouvoir pathogène du secret. L’auteur, à partir de l’analyse d’un épisode de sa propre vie, montre la fonction de vérité qui peut surgir avec l’utilisation des techniques de médiation dans le champ transférentiel de la psychothérapie psychanalytique familiale.
Dans son article La narration dans la séance familiale: comment construire l’histoire, Anna Maria Nicolò, à partir du travail thérapeutique avec des adolescents ou des jeunes adultes qui ont eu une décompensation psychotique ou une rupture sévère du développement, considère l’utilité de travailler avec leurs souvenirs avant ou au début de la crise et de rétablir, si possible, une continuité de leur histoire au cours de leur vie. Avec la présentation d’un cas clinique de psychanalyse familiale, l’auteur expose comment la narration de l’histoire familiale par chacun des membres de la famille en séance, et reconstruite en présence de l’analyste, peut s’avérer un puissant outil diagnostique et thérapeutique.
Pierre Benghozi, dans son article Le remaillage narratif: néocontenant narratif néomythique et résilience narrative en thérapie familiale psychanalytique, propose une réflexion sur les pathologies des contenants psychiques, plus particulièrement généalogiques. L’auteur, à partir d’une séquence de psychothérapie psychanalytique familiale, développe les notions de remaillage narratif des contenants et de résilience narrative.
L’article de David Scharff, Brief intensive intervention in a marital crisis, décrit l’intervention brève avec une situation conjugale hautement problématique. En se centrant sur la théorie de la relation d’objet, l’auteur détaille l’évaluation, aussi bien qu’un point de virage dans le processus de cette intervention brève qui s’est développée pendant presqu’un mois, avec une focalisation spécifique sur le transfert dynamique.
Dans l’article El tiempo en movimiento. Historia familiar. Acontecimiento, Sonia Kleiman réfléchit sur la temporalité en partant des transformations disciplinaires qui ont fait trembler les XXe et XXIe siècles. Son interrogation se centre en particulier sur la façon dont les questions de l’être, de l’histoire, de la causalité et de la détermination interpellent le champ du travail psychanalytique.
Dans son article The “couple analytic setting” and the psychic development of the couple, Mary Morgan propose une réflexion sur le cadre interne de l’analyste face aux couples, à partir du concept d’“état d’esprit de couple”. À travers l’analyse d’un processus de psychothérapie psychanalytique de couple, l’auteur insiste surtout sur les notions de sens, de perspective et de continuité.
Enfin, Lucia Balello, Raffaele Fischetti et Fiorenza Milano, dans leur article Cinco personajes en busca de una familia, s’appuyent sur un cas clinique de psychothérapie psychanalytique familiale pour décrire le processus de subjectivation familiale. Les auteurs se réfèrent, en particulier, à la notion de groupalité développée par Armando Bauleo.
[1] Psycologue, psychanalyste, membre IPA/SPI, membre du CA de l’AIPCF , directrice de la Revue AIPCF, professeur et superviseur au PCF (cours de Post-spécialisation et recherche clinique en psychothérapie psychanalytique du couple et de la famille de Rome), professeur et superviseur à l’Istituto Winnicott iW à Rome, membre du comité de rédaction de la revue Interazioni (Franco Angeli, Milan, Italie). daniela.lucarelli@gmail.com
[2] Psychologue, psychanalyste SPI (IPA), psychothérapeute psychanalytique de couple et de famille, enseignant-chercheur à l’Université de Naples “Federico II”, membre du CA et du CS de l’Association
Internationale de Psychanalyse de Couple et de Famille. sommanti@unina.it