REVUE N° 10 | ANNE 2011 / 2
ÉDITORIAL
DAVID BENHAÍM, EZEQUIEL A. JAROSLAVSKY
Ce numéro 10 a pour titre, Thèmes de famille et réunit une série d’articles qui envisagent divers thèmes relatifs à la famille.
Dans l’article, La transformation silencieuse de la famille, Lucarelli et Tavazza partent de l’idée de la sensibilité de Freud au contexte culturel, à ses transformations et à ses effets sur la vie psychique. À partir de cette prémisse, elles vont étudier les transformations qui affectent de façon radicale les familles au seuil de ce XXIe siècle; ce qui les amène à parler de nouvelles familles par opposition aux anciennes. Pour faire cette étude, elles se donneront d’abord un cadre qu’elles empruntent au philosophe François Jullien, le concept de «transformation silencieuse» pour cerner l’idée d’une réalité fluide et indéterminée, toujours en mouvement, où ce qui est, a déjà changé sous nos yeux. Il s’agirait d’une vision héraclitéenne. Elles empruntent ensuite au sociologue britannique Zigmunt Bauman le concept de liquidité pour caractériser le contexte d’incertitude dans lequel nous vivons. Les liens sont, aujourd’hui liquides, c’est-à-dire, fragiles, intrinsèquement transitoires et non durables. Elles inscriront dans ce cadre leurs considérations à propos des déstabilisations qui touchent la famille, le couple, les liens, les relations affectives.
Dans Dépendance et ses dérives selon le vertex de l’intersubjectivité, Alberto Eiguer pose la théorie des liens intersubjectifs comme la perspective la plus féconde pour avancer dans l’étude de la dépendance. L’originalité de l’auteur consiste à déplacer la perspective à partir de laquelle les psychanalystes interrogent la question de la dépendance : délaissant une interrogation centrée sur l’individu et ses mécanismes, il centre son interrogation sur le contexte familial dans lequel l’individu se développe. C’est là qu’entre en jeu la théorie de l’intersubjectivité. Cela le conduit à poser un certains nombre de questions qu’il va discuter et à partir desquelles il élaborera la question de la dépendance.
Dans Le secret comme obstacle, Irma Morosini se demande ce que devient le processus de thérapie psychanalytique familiale lorsqu’un des membres de la famille annonce au thérapeute l’existence d’un secret et sa décision de ne pas le communiquer aux autres membres, le pose comme condition pour accepter de s’engager dans le travail analytique enfermant ainsi le thérapeute dans ce secret. Que devient le travail analytique dans ces conditions? Que devient le contretransfert du thérapeute devant cette imposition et devant la violence de ce silence? Ces questions sont illustrées par l’auteur à partir d’un cas clinique.
Dans Paradoxes groupalistes, Jacques Robion prend une position polémique vis-à-vis de la question du groupal et de ceux qui se déclarent groupalistes en dénonçant à la fois ce qu’il appelle le paradoxe et l’illusion groupalistes, paradoxe et illusion qui consisteraient, tout en se déclarant groupaliste, à exclure ceux qui ne travaillent pas autour de certains concepts comme les imagos ou les fantasmes inconscients organisateurs.
Dans son article, Tiempos y filiaciones a la adolescencia en terapia familiar psicoanalitica, Rosa Jaitin prend le concept de temporalité comme le fil rouge de sa réflexion. La séparation des adolescents de leur famille ouvre la dimension de l’avenir comme dimension privilégiée de refondation. Elle envisage la question, comme elle l’écrit elle-même, «à partir du rythme d’échange entre les différents membres de la famille au niveau inter et transgénérationnel dans ses différentes dimensions de filiation : le lien de couple, le lien filial, le lien fraternel.» Les concepts d’échange, de rythme de l’échange, d’articulation des rythmes d’échange entre les différents membres de la famille lui semblent essentiels pour saisir les failles dans les liens de filiation. Un cas clinique viendra illustrer la réactivation des blessures de la filiation dans les familles d’adolescents comme tentative d’élaboration de la souffrance.
Enfin dans la section d’analyse et de commentaire d’ouvrages, Critique épistémologique ou procès contre Freud de David Benhaïm analyse et commente longuement le livre de Guy Laval Un crépuscule pour Onfray, réponse au livre d’Onfray Le crépuscule d’une idole. Il montre comment Laval, dans un essai vigoureux et honnête, déconstruit le texte d’Onfray dans une étude critique qui le suit pas à pas et le commente.
Pour conclure, nous tenons à exprimer notre vive gratitude au Dr Anna Nicoló, l’éditeur sortant du Journal AIPCF. La revue a été fondée sous sa direction, a grandi et s’est développée richement jusqu’à présent. Elle a heureusement a exprimé son souhait de continuer à participer et à collaborer avec nous en tant que membre du Comité de rédaction.
Nous tenons à lui exprimer notre plus sincère reconnaissance pour son travail comme rédacteur en chef, ainsi que notre disposition à suivre les lignes directrices qu’elle a mises en place.
David Benhaïm
Ezequiel A. Jaroslavsky
Codirecteurs
Revue AIPCF