REVUE N° 26 | ANÉE 2022 / 1
Résumé
Clinique, souffrance et attaque de la métagarance dans les familles, les institutions et le lien social
Je définis la “métagarance”, dans ma perspective du maillage des contenants généalogiques, en continuité des notions de garants métasociaux d’A. Touraine, de garants métapsychiques de R. Kaës, de sécurité du Moi de D. Winnicott, de contenant de W. Bion, d’attachement sécure de J. Bowlby. La métagarance a pour fonction de garantir un contenant protecteur suffisamment sécure. C’est une responsabilité éthique pour le sujet ou le groupe concerné par un lien de filiation ou d’affiliation. Les parents ont une responsabilité de métagarance vis-àvis de leurs enfants. La justice et la police sont métagarants du lien social dans un état démocratique. L’attaque catastrophique de la métagarance: c’est l’effraction de la contenance sécure quand le métagarant devient la menace et le danger. Comme le père incestueux, ou la police d’un état totalitaire. La clinique de la métagarance sera illustrée dans les situations de crise et de catastrophe telle que la pandémie.
Mots-clés: métagarance, responsabilité éthique, liens, contenant sécure, inceste
Resumen
Sufrimiento y ataque de metagarancia en familias, instituciones y enlaces sociales
Defino “metagarancia”, en mi perspectiva de la malla de contenedores genealógicos, en la continuidad de las nociones de garantes metasociales de A. Touraine, de garantes metapsíquicos de R. Kaës, de la seguridad del ego de D. Winnicott, de contenedor W. Bion, el apego seguro de J. Bowlby. La función del metagarance es garantizar un contenedor protector suficientemente seguro. Es una responsabilidad ética del sujeto o grupo afectado por un vínculo de filiación o afiliación. Los padres son responsables de la metagarancia hacia sus hijos. La justicia y la policía son metagarantes de los vinculo sociales en un estado democrático. El catastrófico ataque del metagarance: es la ruptura de la capacidad segura cuando el metagarant se convierte en amenaza y peligro. Como el padre incestuoso, o la policía de un estado totalitario. La clínica de metagarance se ilustrará en situaciones de crisis y desastres como la pandemia.
Palabras clave: metagarancia, responsabilidad ética, vinculo, contenedor seguro, incesto.
Summary
Suffering and attack of metagarance in families, institutions and social links
I define “metagarance”, in my perspective of the netting of genealogical containers, in continuity of the notions of A. Touraine’s metasocial guarantors, R. Kaës’s metapsychic guarantors, D. Winnicott’s ego security, W. Bion’s container and J. Bowlby’s secure attachment. The function of metagarance is to guarantee a sufficiently secure protective container. It is an ethical responsibility for the subject or group concerned by a link of filiation or affiliation. Parents have a responsibility for metagarance towards their children. Justice and the police are metagarants of social links in a democratic state. The catastrophic attack of metagarance: it is the breach of secure container when the metagarantor becomes the threat and the danger. Like the incestuous father, or the police of a totalitarian state. The metagarance clinic will be illustrated in situations of crisis and disaster such as the pandemic.
Keywords: metagarance, ethical responsibility, links, secure container, incest.
ARTICLE
La métagarance est un métaconcept fonctionnel qui s’origine d’une approche clinique globale transversale individuelle et groupale, dans une perspective topique inter et transcontenante. On y retrouve les notions de contenance et d’enveloppe psychique, somatique et socioculturelle
Je ne pourrais que situer sans les développer dans cette présentation synthétique, les points d’articulation et de filiation théorique dans lesquels s’inscrit ce métaconcept. Je définis la métagarance comme la fonction qui permet de garantir une contenance psychique protectrice suffisamment sécure. En tant que concernée par un lien de filiation et/ou d’affiliation, c’est une « responsabilité » éthique, au sens d’Emmanuel Levinas (1991), pour le sujet, le groupe, la famille, la communauté, l’institution, l’État.
Les parents, par exemple, ont une responsabilité de métagarance vis-à-vis de leurs enfants dans le processus de croissance. La justice, la police et le pouvoir politique sont métagarants du lien social dans un état démocratique.
J’envisage la conceptualisation de la “métagarance”, dans ma perspective psychanalytique du maillage des contenants généalogiques, par les liens psychiques de filiation et d’affiliation (Benghozi, 1994,1995, 1999, 2007) en continuité des notions de “care”, d’un prendre soin de l’autre vulnérable, de celles de contenant permettant d’assurer une transformation psychique selon W.R. Bion (2010), d’attachement sécure de J. Bowlby (1978), de garants métasociaux d’A. Touraine (1978), de garants métapsychiques de R. Kaës (1996, 2012) de sécurité du Moi de D. Winnicott (1992) et d’enveloppe psychique de D. Anzieu (1985).
Envisageons la clinique de la métagarance :
La clinique de la métagarance est à penser comme condition d’une dynamique processuelle. Elle prend en considération les conditions psychosociales économiques, éducatives et culturelles, mais aussi bio-somatiques qui en permettent l’émergence, ou en parasitent l’expression.
La métagarance est illustrée ici dans une approche de la complexité (Morin, 1990), comme un processus d’émergence du nouveau.
Le processus de croissance individuel s’inscrit dans le cycle de vie groupal familial mais aussi communautaire, socioculturel et généalogique.
Il nous faut envisager une topique transcontenante: (Benghozi, 1996, 1999a, 1999b, 2009) individuelle/familo-communautaire/sociale.
Il y a un co-étayage réciproque et simultané des mues de contenants en transformation.
Nous pouvons modéliser un emboîtement en poupée russe de ces contenants. Il y a un co- étayage réciproque du maillage des liens en co-construction entre la contenance individuelle, la contenance groupale familiale et communautaire et la contenance sociale, économique et culturelle. J’utilise la métaphore d’une co-construction kaleidoscopique (Benghozi P., 1999a) des emboitements de contenants.
Je distingue, dans cet article, l’exercice, les failles et l’attaque de la métagarance (Benghozi, 2019a, 2020b, 2022) à propos de la contenance groupale, familiale, institutionnelle et sociale.
L’exercice de la métagarance
Dans la famille nucléaire, les membres reliés par un lien de filiation à un autre membre de cette famille, sont concernés vis-à-vis de lui par la responsabilité de garantir les conditions de protection de sa contenance sécure. C’est un pacte éthique généalogique périnatal, qui est engagé dès avant la naissance, dans ce que j’appelle “le scénario pré-conceptionnnel” entre les futurs parents, la famille et l’enfant à naître. La contenance de l’enfant est garantie par l’ensemble des réponses assurant les besoins vitaux de l’enfant. Cette fonction est assurée dans le mouvement des interactions précoces psychoaffectives et de leur accordage entre le bébé et l’environnement parental, familial, social…
La métagarance peut ainsi être assurée par un parent vis-à-vis d’un enfant, par le couple parental, par le groupe familial, par le groupe communautaire.
Selon une formule classique, on dit même en Afrique qu’“il faut tout un village pour assurer la protection d’un enfant”.
La métagarance d’une contenance suffisamment sécure vise à garantir une inscription suffisamment claire, c’est-à-dire lisible du lien, que ce lien soit un lien de filiation, ou un lien d’affiliation.
Le travail de métagarance en pouponnière prend, par exemple, en considération la béance du maillage contenant généalogique de l’enfant abandonné, en lui assurant soins et protection sans dénier l’existence de la famille d’origine et le trauma de l’abandon.
Le lien de filiation est pensé aussi des descendants vers les ascendants, lorsque, par exemple, un parent ou un grand-parent est en situation de souffrance, de vulnérabilité psychique ou physique, de handicap, de dépendance.
Distinguons également la métagarance dans la fratrie comme à propos de la protection d’un frère ou d’une sœur en situation de handicap. La famille élargie, la communauté d’appartenance socio-culturelle assurent une fonction métagarante de protection sécure des vulnérabilités.
Au niveau de l’institution
La direction, les cadres ont à assurer, dans la mesure où ils sont concernés par un lien institutionnel, la contenance sécure institutionnelle au niveau singulier des professionnels, par exemple, à propos d’un harcèlement, et au niveau groupal, d’une contenance institutionnelle suffisamment sécure pour assurer la viabilité des activités correspondant à la mission, au projet institutionnel, dans la cohérence du respect des valeurs fondatrices.
Nous avons, par exemple, été missionnés récemment, par une importante association d’action psychosociale, pour réaliser une action-recherche sur l’évaluation de l’impact institutionnel de la pandémie du Covid-19, et du confinement sanitaire imposé, sur les pratiques professionnelles (P. Benghozi, R. Benghozi, 2021). Nous avons pu constater les effets structurants de la métagarance institutionnelle dans l’engagement des professionnels à assurer la meilleure qualité de soutien possible auprès des enfants et des familles en souffrance pendant cette période traumatique.
Les professionnels se sont mobilisés en étant disponibles et créatifs pour répondre au mieux. L’action-recherche a montré que cet élan groupal professionnel résilient a pu se réaliser grâce à la réactivité métagarante de la direction coordonnée qui a, au plus vite grâce à la formulation claire et cohérente d’un plan de continuité de l’activité et à la mise à disposition très rapide des protections sanitaires et des moyens technologiques audiovisuels, permis de soutenir une activité, même à distance, de soin et d’accompagnement des populations vulnérables.
Dans cette situation, la résilience institutionnelle s’inscrit dans la métabolisation de l’héritage traumatique vécu au sein de l’institution. Celle-ci avait été menacée de péril, quelques années plus tôt, dans un contexte de grave crise de la métagarance directionnelle.
Dans une institution, d’une façon générale, l’intervenant auprès d’une une équipe, en situation organisationnelle, logistique, clinique, de formation, de supervision… a une responsabilité de métagarance.
J’ai décrit, par exemple, la fonction métagarante dans une supervision (Benghozi, 2019a). Le superviseur d’une équipe en institution a la responsabilité de garantir une contenance suffisamment sécure du cadre de la supervision et de son métacadre en amont même de la mise en place de la supervision, pour contenir le processus de transformation des participants à la supervision.
Au niveau de l’État
La fonction métagarante recouvre en règle les fonctions régaliennes de protection de la santé, de liberté, de sécurité, de justice, d’intégrité contre les violences dans le respect de la loi.
En France, le défenseur des droits participe à garantir cette fonction de métagarance. L’accueil-accompagnement des mineurs migrants non accompagnés, avec ses paradoxes, en témoignent. (Benghozi, 2022).
Mais l’exercice de la métagarance peut être confronté à des failles.
Défaillances de la métagarance
Au niveau familial
Les conditions de protection de la contenance sécure d’un enfant peuvent être défaillantes. C’est l’enjeu des fonctions de suppléance assurées dans le cadre de la protection de l’enfance, à propos de situations de carence, de maltraitance parentale et familiale, de protection pour des enfants en situation de précarité et d’insécurité.
Des familles d’accueil peuvent étayer des situations de faille de la métagarance familiale. (Benghozi, 2002, 2007)
Dans une institution
Les failles de la métagarance peuvent se manifester par des flous dans l’organisation des frontières hiérarchiques, de la place de chacun, du sens des missions. La circulation intempestive de directives contradictoires peut déstabiliser les repères nécessaires à la contenance sécure institutionnelle et se traduire, au niveau des équipes de professionnels, par une crise de confiance sur la garantie de toute initiative, une perte de sens sur l’engagement des missions auprès des populations, une crise d’identité professionnelle, un sentiment de menace sur la place, sur le devenir, de chacun sur celui de l’institution…
Au niveau de l’État
C’est, par exemple, l’importance de l’enjeu des instances protectrices régaliennes, comme la confiance en une police suffisamment protectrice. Un adolescent de famille immigrée dans un quartier populaire m’indiquait qu’une des consignes de sa mère, quand il sortait de la maison, était : « Fais attention à la police !… »
En France, le président de la République a été directement interpellé par des familles dont un enfant est décédé, pour intervenir en garantissant les citoyens contre desdites “bavures” policières.
Dans le contexte de la crise sanitaire internationale actuelle du Coronavirus, nous constatons que la gestion de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques et sociales dépend de la qualité spécifique de la métagarance assurée en fonction de la politique métagarante de l’État concerné.
Nous avons au Brésil, comme aux États-Unis de façon caricaturale avec Donald Trump, une illustration exemplaire d’une défaillance de la métagarance politique de l’État. Alors que tous les indicateurs révèlent la gravité de la situation sanitaire, le Président brésilien Jair Bolsonaro s’exhibait dans des bains de foules et des embrassades, déniant, voire défiant, le danger. Il rejetait la mise en application de toutes les mesures barrières de protection sanitaire. C’est l’ensemble de la Nation, du contenant Nation brésilienne, qui s’est retrouvé dans l’insécurité. Et c’est le Président lui-même qui a été affecté par la maladie… Des milliers de morts brésiliens n’ont pu bénéficier du soutien et de la protection sanitaire et sociale nécessaire.
L’attaque de la métagrance
J’appelle “attaque de la métagarance” l’effraction catastrophique des assises de la contenance sécure (Benghozi, 1997, 2000) quand le référent métagarant légitime, c’est-à-dire concerné par le lien, non seulement n’est plus protecteur mais devient la menace et le danger.
Au niveau familial
C’est, par exemple, le père incestueux. Ce père, concerné par un lien de filiation, donc éthiquement responsable non seulement ne garantit pas la protection mais, au contraire, il est l’acteur de l’effraction de la contenance psychique de son enfant. (Benghozi, 2020a, 2021b) L’expérience clinique comme thérapeute d’enfants incestés m’a montré la difficulté pour ces enfants de gérer ce traumatisme, malgré des prises en charge prolongées. (Benghozi, 2021b). La notion d’attaque de la métagarance m’a permis de mieux comprendre la gravité extrême de cette effraction. Le traumatisme est non seulement associé aux conséquences directes de la violence sexuelle mais aussi à l’effondrement des fondements des assises narcissiques de l’enfant. Geneviève Haag (2018) a montré, en l’illustrant par une pratique de la thérapie familiale psychanalytique, la construction intersubjective familiale des enveloppes psychiques et des limites de l’image inconsciente du corps. Avec l’inceste, c’est avec l’attaque de la filiation, une attaque des assises contenantes de la sécurité de base, une attaque des assises primaires fondatrices du narcissisme. Les fondements organisateurs du maillage de la contenance généalogique des liens sont attaqués.
L’inceste est paradigmatique de l’attaque de la métagarance. Nous la retrouvons dans toutes les organisations incestuelles et incestueuses caractérisées par une figure de l’auto-engendrement.
Au niveau institutionnel
C’est une responsabilité légitime, qui engage le directeur, l’équipe de direction, garant du “cadre hiérarchique”, l’équipe des professionnels dans les institutions accueillant des enfants et des adolescents. Le contenant organisationnel institutionnel peut être sécure, insuffisamment sécure ou insécure, laissant alors ouvert le scenario pervers de dérives incestuelles.
C’est, par exemple, au niveau d’une institution pour laquelle j’ai été sollicité comme psychanalyste consultant institutionnel à la suite d’une situation de violence (Benghozi, 2020b). Un éducateur et une éducatrice voulaient donner à un enfant opposant dans un foyer, “une leçon”, en le menaçant par la mise en scène d’un simulacre de son enterrement vivant. L’enfant a été terrorisé. J’ai décrit, à propos de cette situation, une attaque de la métagarance institutionnelle. Non seulement la garance d’une contenance protectrice suffisamment sécure n’était plus assurée pour les enfants accueillis dans le foyer, mais encore ceux qui en ont la responsabilité légitime, c’est-à-dire ici la direction, les cadres éducatifs en fonction de leur position dans le lien affiliatif qui les relie aux enfants, les éducateurs, en sont devenus la menace, la source de l’effraction.
Ce qui est caractéristique, dans ce type d’attaque de la métagarance institutionnelle, c’est la violence totalitaire institutionnelle. C’est, tel que je le décris à propos de toutes les organisations incestuelles totalitaires, l’existence d’un collapsus entre la règle et la Loi (Benghozi, 2020b, 2021a). L’arbitraire de la règle interne institutionnelle s’impose sur un mode tyrannique auto-engendré aux dépends du respect de la Loi sociale. La défaillance de la tiercéité structurante de la Loi témoigne d’une organisation incestuelle des frontières de l’institution.
Le déroulement de la consultation institutionnelle a sans cesse confirmé et précisé les manipulations des règles institutionnelles. La pratique de la fouille, la consommation interdite de cigarettes à l’intérieur du foyer font l’objet d’interprétations floues et d’une application de la règle avec une pratique transgressive selon les équipes, voire complice selon les éducateurs, avec des dérives transgressives. Quand l’incestualité de ces pratiques se révèle, les conflits d’équipe éclatent entre les agents sans que le respect des interdits ne fasse consensus et ne soit clairement rappelé pour tous. La consultation institutionnelle nous a révélé une dérive incestuelle groupale institutionnelle avec une emprise toute-puissante déléguée à certains éducateurs. Le groupe institutionnel, les cadres de direction, ont été défaillants à garantir la métagarance nécessaire vis-à-vis des jeunes auxquels ils doivent une protection sécure. La violence institutionnelle témoigne des failles et de l’attaque de la métagarance institutionnelle.
Ces foyers socio-éducatifs sont souvent amenés à recevoir, il nous faut le rappeler, des jeunes de familles à organisation incestuelle, voire incestueuse, elles-mêmes concernées par une attaque de la métagarance. Les familles sont décontenancées, souvent décomposées, parfois recomposées. Les frontières générationnelles sont floues, la fonction de tiercéité parentale, en particulier celle de l’imago paternelle, est en souffrance. La référence à l’affiliatif néo-clanique se substitue dans ces institutions non métagarantes, à penser en miroir en résonnance de dépôt sur le cadre institutionnel (Bleger, 1979).
Ces consultations institutionnelles, articulées au métacadre thérapeutique psychoéducatif et social, positionnent nécessairement le juridique et visent à étayer l’émergence d’une métagarance institutionnelle sécure. L’enjeu clinique est, ici, l’avènement d’une nouvelle métagarance institutionnelle alternative. La coconstruction d’un néo-contenant narratif institutionnel alternatif assure un remaillage du contenant institutionnel implosé, en étayage des accrocs et des déchirures du maillage-contenant institutionnel (Benghozi, 2005, 2019b).
Nous ne développerons pas ici les défaillances et attaques de la métagarance enfin médiatisées, malgré l’omerta institutionnelle, dont témoignent les pratiques pédophiles par des prêtres, donc ayant un lien d’ascendance sur des enfants, trop longtemps couvertes par la conspiration maffieuse du silence, dans des institutions religieuses ou dans les organisations de type sectaire.
C’est aussi l’enjeu de la parole qui se libère à propos des violences sexuelles, dans les situations incestuelles et d’inceste, avec le mouvement #MeeToo, et de la mise en place, dans différentes institutions de la société du spectacle, de référents institutionnels chargés d’une protection de la métagarance institutionnelle des professionnels.
Au niveau des États
L’attaque de la métagarance est paradigmatique des États totalitaires. L’organisation du maillage des contenants des États totalitaires est isomorphe, c’est-à-dire analogue à celle des organisations familiales et institutionnelles incestuelles et incestueuses. Dans un État totalitaire, comme à la suite du coup d’État militaire au Chili avec le général Pinochet, la police, l’armée, la justice non seulement ne sont plus protectrices, par exemple, des enfants des rues, mais deviennent la menace et le danger. Des jeunes membres des jeunesses hitlériennes sous l’emprise de l’État totalitaire nazi, nous le savons, ont dénoncé leurs propres parents pour insoumission à l’idéologie du Reich.
C’est une des difficultés à penser avec le pacte radical d’alliance entre la familleadolescente et l’organisation jihadiste, le retour en France de ces adolescents, les “lionceaux du califat” embrigadés par Daesh, l’État islamiste (Benghozi, 2021a). C’est la métagarance des contenants de l’intime, des contenants du privé, des contenants du social, qui est attaquée.
Conclusion
La clinique de la métagarance nous concerne tous dans le lien que nous avons avec nos patients en thérapie, en formation ou, par exemple, dans une pratique de supervision…
C’est la référence à une position éthique dans notre clinique professionnelle, mais audelà, fondamentalement dans notre rapport subjectif à l’autre et à l’altérité, celle de son “visage” dans la continuité de Levinas (1991), celle du respect de la dignité du sujet (Benghozi, 1996), de la responsabilité du lien de l’Humain à l’Humain.
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